
L’éditeur allemand va prochainement soumettre des propositions à la Commission européenne qui clôt son enquête sur les pratiques de licences et de maintenance des logiciels de SAP.
En septembre dernier, la Commission européenne a ouvert une enquête formelle après avoir conclu que SAP pourrait restreindre la concurrence sur le marché de la maintenance et du support des ERP installés sur site. Dans ce cadre et selon Reuters, l’éditeur allemand doit prochainement soumettre à l’exécutif des mesures correctrices pour ses pratiques illégales et éviter ainsi une amende pouvant atteindre 10% de son chiffre d’affaires mondial, soit plus de 3,1 Md€.
Les pratiques dénoncées
Dans son évaluation préliminaire, la Commission a identifié quatre pratiques susceptibles d’enfreindre les règles de concurrence dans els 27 pays de l’UE. Ainsi, SAP exige de ses clients qu’ils souscrivent au même niveau de maintenance et de support, à un tarif identique, pour toutes leurs instances ERP sur site. Ceci les empêche de combiner les services de support de différents fournisseurs à des prix différents, même si cela correspondrait mieux à leurs besoins.
L’éditeur empêche également ses clients d’annuler la maintenance des licences logicielles inutilisées et de résilier les contrats de support lorsqu’elle prolonge la durée initiale de la licence. Si un client parvient à le faire puis à revenir sous le support SAP, l’entreprise facture des frais de réactivation et de maintenance rétroactive pouvant être équivalents à ce qu’il aurait payé s’il n’avait jamais résilié son contrat, annulant ainsi toute économie réalisée en faisant appel à un prestataire tiers entre-temps.
Des années de plaintes
L’enquête s’appuie sur plus d’une décennie de réclamations clients. En 2010, l’éditeur Versata a déposé une plainte pour pratiques anticoncurrentielles contre SAP, l’accusant de l’avoir illégalement exclue de grands comptes en refusant de partager des informations sur l’interopérabilité et en intégrant des logiciels concurrents à ses ERP. En 2018, l’association allemande des utilisateurs de technologies de l’information VOICE – qui compte 400 membres, dont Siemens, Adidas et Volkswagen – a porté plainte auprès de l’Office fédéral allemand des cartels contre le modèle de licence d’« utilisation indirecte » de l’éditeur allemand, lequel facture des frais lorsque des applications tierces accèdent aux données SAP. La Commission européenne a lancé son examen systématique des pratiques du marché des ERP en 2022, en adressant aux entreprises des questionnaires détaillés sur les services d’assistance après-vente. Elle a également examiné Oracle, mais s’est concentrée sur SAP en raison de sa forte présence dans l’UE.
Des concessions utiles pour les clients historiques
Cette enquête est particulièrement importante pour les utilisateurs des applications ECC et Business Suite 7, dont la maintenance standard sera arrêtée fin 2027. SAP propose un support étendu à des tarifs plus élevés jusqu’en 2030, ainsi qu’un support de transition plus limité jusqu’en 2033. Des prestataires tiers, comme Rimini Street, proposent quant à eux un support jusqu’en 2040, sous réserve des conditions contractuelles. Ce calendrier est crucial : les entreprises qui envisagent des migrations longues depuis leurs anciens systèmes SAP ont besoin de visibilité sur leurs options de support, d’autant plus que les prestataires de maintenance tiers se positionnent comme des alternatives économiques durant cette période de migration prolongée. Selon Reuters, le fournisseur a déclaré que ses politiques de maintenance et de support sur site « reposent sur des normes établies et communes à l’ensemble du secteur mondial du logiciel » et sont conformes aux règles de la concurrence.
Ces concessions devraient simplifier la transition vers des prestataires de support concurrents et apporter des explications plus claires sur la structure tarifaire de l’éditeur, toujours selon l’agence de presse. Si elles sont acceptées, ces propositions pourraient remodeler les négociations de licences SAP avant l’échéance de 2027, date à laquelle la maintenance standard des systèmes ECC et Business Suite 7 existants prendra fin. Les responsables informatiques qui planifient des transitions prolongées disposent désormais d’un levier potentiel pour négocier de meilleures conditions sur les contrats de maintenance et envisager un support tiers sans encourir de frais exorbitants. Cette affaire témoigne également d’un examen plus approfondi, au sein de l’UE, des pratiques de licence des logiciels d’entreprise. L’issue du dossier SAP pourrait influencer la manière dont les autres fournisseurs structurent leurs offres de support après-vente en Europe.