
Le CSE central de SFR a fait appel de la décision du Tribunal des activités économiques de Paris validant l’ensemble du plan de sauvegarde d’Altice présenté par Patrick Drahi et ses créanciers et demande d’en exclure les filiales de la maison-mère. Les syndicats de l’opérateur télécoms alertent sur le risque d’un démantèlement du groupe entraînant des licenciements massifs.
Démantèlement, vente à la découpe, casse sociale. C’est ce que craignent les syndicats de SFR après la validation par le tribunal des activités économiques de Paris de la restructuration de la dette d’Altice France, la maison mère de l’opérateur SFR. Dans sa décision rendue ce lundi 4 août, le tribunal n’a pas suivi les réquisitions du ministère public, qui avait demandé l’exclusion de certaines filiales du groupe dont l’opérateur SFR d’un plan de sauvegarde accéléré. Contre l’avis du procureur de la République, le parquet a validé l’accord passé entre le fondateur du groupe Altice, Patrick Drahi et ses créanciers pour alléger sa colossale dette de 24,1 milliards d’euros. D’après les termes de l’accord, les créances du groupe vont baisser de 8 milliards, pour atteindre 15,5 milliards d’euros. En contrepartie Altice paye, selon le syndicat Unsa, 2,2 milliards d’euros à ses prêteurs. Ceux-ci vont aussi entrer au capital de l’entreprise à hauteur de 45%, tandis que Patrick Drahi reste actionnaire majoritaire avec 55%. Les huit filiales du groupe initialement mentionnées par l’accord de réduction de dette devront également y contribuer.
Les syndicats, demandant que les entités SFR SA, SFR Fibre et Completel (branche dédiée aux entreprises) soient exclues du plan de restructuration, ont décidé de faire appel de la décision. « Ces divisions, dont SFR, ne sont pas endettées et n’ont jamais souscrit de crédits auprès des créanciers, nous confie Abdelkader Choukrane, délégué syndical central Unsa de SFR. Elles n’ont donc aucune raison d’être les garants du remboursement de la dette de la maison-mère. » Selon le représentant du personnel de l’opérateur, SFR gagne de l’argent. De plus, la dette de la maison-mère n’a jamais fait l’objet de remboursements depuis 10 ans, pire elle a constamment augmenté. « Au lieu de faire rentrer des dividendes, on peut notamment citer l’augmentation des parts d’Altice dans l’opérateur British Telecom (BT) », nous précise le représentant syndical. Soit, un investissement supplémentaire d’environ 1 milliard de livres.
Des rumeurs de rachat pour concentrer le marché
Le CSE Central de SFR a unanimement décidé de lancer des recours juridiques contre le plan de sauvegarde accéléré de la dette de 24 milliards d’euros d’Altice et demandé l’exclusion de ses filiales. La CFDT et l’Unsa considèrent cette procédure comme insincère, visant la vente et le démantèlement d’Altice France et SFR. « Nous dénonçons un projet au sein duquel l’impact social n’a pas été présenté, sachant que la dette est réduite mais qu’il faudra rembourser plusieurs milliards d’euros », s’insurge Abdelkader Choukrane. Pour lui, le scénario le plus probable, et celui qui se profile, est celui d’une vente à la découpe. En effet, SFR fait l’objet de nombreuses rumeurs de rachat. Bouygues Telecom, Orange et Iliad, ainsi que certains acteurs du Moyen-Orient, sont intéressés. En juillet, Orange a réaffirmé son soutien à une concentration du marché télécom et évoqué une possible concertation avec ses concurrents pour passer à un marché à trois acteurs.
Face à ces perspectives, l’Unsa SFR a alerté le gouvernement sur les conséquences sur l’emploi qui découleraient d’une vente d’Altice au global ou seulement de SFR auprès des trois opérateurs. « Nous craignons un nombre important de doublons », alerte le Abdelkader Choukrane. C’est pourquoi nous demandons des engagements garantissant le maintien des emplois au gouvernement. La situation semble préoccupante car ce dernier, par l’intermédiaire de son ministre délégué à l’Industrie, Marc Ferracci, a fait savoir qu’en cas d’offres de rachats, la téléphonie resterait un enjeu de souveraineté en France, mais il n’a pas répondu aux organisations syndicales », regrette-t-il. L’intérêt social est d’ailleurs présenté avec précision dans la loi Pacte 2019, rappelle ce dernier. De son côté, la direction d’Altice n’a pas répondu à nos questions à l’heure où nous publions ces informations.