
Lancée en 2019 pour remplacer la gestion des cookies tiers et tracer la navigation des internautes, la Privacy Sandbox de Google est définitivement abandonnée. Présentée comme plus respectueuse de la vie privée, elle n’a pas réussi à séduire les annonceurs et diffuseurs de contenus.
Clap de fin pour Privacy Sandbox, la tentative de Google de proposer une alternative aux cookies. La firme de Mountain View a annoncé qu’elle abandonnait 11 de ses technologies, soit la quasi-totalité de celles qui composent cette offre. Anthony Chavez, vice-président de Privacy Sandbox, a déclaré dans un billet de blog que l’équipe avait pris cette décision « après avoir évalué les commentaires de l’écosystème sur leur valeur attendue et en tenant compte du faible niveau d’adoption ». Google a lancé cette initiative en août 2019 afin de permettre aux annonceurs d’obtenir des informations sur les utilisateurs sans utiliser des cookies tiers. Elle a suscité de nombreuses critiques de la part du secteur. Les rêves de Google d’un avenir sans cookies ont pris un coup après que l’Autorité britannique de la concurrence et des marchés a annoncé qu’elle ouvrait une enquête antitrust pour déterminer si le firme de Mountain View abusait de sa position dominante sur le marché des navigateurs. Une démarche qui a été suivie par plusieurs États américains, qui ont chacun engagé leur propre procédure antitrust.
Cette pression juridique a fini par porter ses fruits. En juillet dernier, Google est revenu sur sa position selon laquelle Privacy Sandbox serait la technologie de confidentialité dominante sur Chrome. L’autorité des marchés et de la concurrence britannique (CMA) a réagi avec prudence et a déclaré qu’elle attendait toujours d’autres engagements de la part de la firme. En avril, cette dernière a fait de nouvelles concessions et, à présent, cette initiative semble avoir dissipé toutes les inquiétudes en matière d’antitrust. Cependant, le manque d’adhésion à la Privacy Sandbox a probablement joué un rôle plus important dans son abandon.
Un taux d’adoption faible
Selon Javvad Malik, conseiller principal en sécurité informatique chez KnowBe4, « le faible taux d’adoption est un signal utile et suggère que cela n’a pas apporté suffisamment de valeur mesurable par rapport à la complexité opérationnelle et aux risques. Lorsque les incitations, les outils et la responsabilité ne sont pas alignés, même les technologies préservant la confidentialité ont du mal à être adoptées. » Il a déclaré que, même s’il comprenait pourquoi Google souhaitait trouver une alternative aux cookies, il existait également une exigence technique. « En ce qui concerne l’alternative aux cookies, le fait qu’une solution soit techniquement viable ne signifie pas qu’elle soit adaptable. Les outils doivent être conçus en tenant compte des utilisateurs. Si les API sont trop incohérentes et le retour sur investissement incertain, de nombreuses équipes auront du mal à les adopter.
Les technologies que Google abandonne sont les suivantes : Attribution Reporting API pour Chrome et Android, IP Protection, Protected Audience API pour Chrome et Android, Protected App Signals, On Device Personalization, Related Website Sets, Private Aggregation (incluant Shared Storage), Select URL, SDK Runtime et Topics pour Chrome et Android. Les seules survivantes sont les API Chips et FedCM (qui améliorent la confidentialité et la sécurité des cookies et rationalisent les flux d’identité, ainsi que Private State Tokens (qui permettent la transmission de la confiance en l’authenticité d’un utilisateur d’un contexte à un autre).
L’avenir incertain des technologies Privacy Sandbox déjà déployées
Pour les entreprises ayant déjà mis en œuvre les technologies Privacy Sandbox au sein de leurs propres organisations, aucune précision n’a été apportée concernant une éventuelle continuité de service et support associé. « Nous poursuivrons nos efforts pour améliorer la confidentialité sur Chrome, Android et le Web, mais nous abandonnerons la solution Privacy Sandbox. Nous sommes reconnaissants à tous ceux qui ont contribué à cette initiative et nous continuerons à collaborer avec le secteur pour développer et faire progresser les technologies de plateforme qui contribuent à soutenir un Web sain et prospère », a indiqué un porte-parole de Google.
Il est peu probable que la décision relative à la Privacy Sandbox ait un effet notable sur la domination de Google sur le marché des navigateurs. Selon Statcounter, Chrome détenait 72 % des parts du marché des navigateurs en septembre. Cependant, les tentatives de Google d’imposer les technologies Privacy Sandbox dans les futures normes web sont abandonnées. Comme l’a déclaré M. Malik, « la normalisation est possible, mais uniquement si elle est légitimée par toutes les parties prenantes. Sans l’adhésion générale des navigateurs, des régulateurs et des éditeurs, les normes web risquent de ressembler à des normes propriétaires ».