Gmail n’est pas un service de communications électroniques selon la CJUE

Saisie par une juridiction allemande, la Cour de Justice de l’Union européenne avait à se prononcer sur une question importante : Gmail est-il un service de communications électroniques ? Aucun doute pour le régulateur allemand des télécoms, mais la CJUE a estimé que le service de messagerie de Google n’en constituait pas un.

Les juges de la Cour de Justice de l’Union européenne ont considéré que Gmail n’est pas un service de communications électroniques.

Voilà une jurisprudence qui va être commentée et qui va poser quelques interrogations pour l’avenir. La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) vient de publier un arrêt où elle considère que le service Gmail « ne constitue pas à un service de communications électroniques ». A l’origine de l’affaire, un litige opposait Google et le gouvernement allemand à propos d’une décision du régulateur des télécoms (BNetzA) constatant que le service de messagerie électronique Gmail comme un service de télécommunications. En conséquence, Google devait se conformer à l’obligation de déclaration. La firme de Moutain View contestait cette appréciation et à ester contre cette décision.

Au coeur de la bataille juridique, l’article 2 sous c) de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002, modifiée le 25 novembre 2009. Cet article définit la notion de services de communications électroniques. La juridiction administrative d’appel du Nordhein-Westfalen a posé à la CJUE une question préjudicielle pour savoir si les services de messagerie électronique sont des services de communications électroniques au sens de l’article 2 sous c) de la directive.

La transmission des signaux, une affaire de nuances

Chaque partie a développé ses arguments. D’un côté, le régulateur allemand considère que pour être qualifié de services de télécommunications, le service fourni doit principalement, dans sa fonction technique, avoir pour objet une transmission de signaux. Tel serait le cas pour Gmail étant donné qu’une transmission de courriers électroniques de l’expéditeur au destinataire n’est possible qu’au moyen d’une transmission de signaux. Ce critère, au coeur du débat, est réfuté par Google considérant que Gmail n’émet pas de signaux, mais plutôt les FAI (fournisseurs d’accès à Internet) qui assurent le transit.

Dans son arrêt, la CJUE considère dans un premier temps qu’ « il est constant que le fournisseur d’un service de messagerie sur Internet, tel que Gmail, réalise une transmission des signaux ». Cependant, « il ne saurait en être conclu que les opérations réalisées par Google pour assurer le fonctionnement de son service de messagerie sur Internet constituent un service de communications électroniques,…, dès lors que ce service ne consiste pas entièrement ou principalement en la transmission de signaux sur des réseaux de communications électroniques ». Pour motiver sa décision, la CJUE considère que « le fait que le fournisseur d’un service de messagerie sur Internet intervienne activement dans les opérations d’envoi et de réception des messages, que ce soit en attribuant les adresses IP des équipements terminaux correspondant aux adresses de courrier électronique ou en procédant au découpage desdits messages en paquets de données et à leur introduction dans l’Internet ouvert, ou à leur réception de l’Internet ouvert, en vue de leur acheminement vers leurs destinataires, n’apparaît pas suffisant pour que ledit service puisse, sur le plan technique, être considéré comme consistant « entièrement ou principalement en la transmission de signaux sur des réseaux de communications électroniques », au sens de l’article 2, sous c), de la directive-cadre ».

L’impact d’une telle jurisprudence n’est pas anodine notamment en France comme le souligne un tweet de maître Alexandre Archambault, « La portée de cet arrêt est lourde de conséquences, puisqu’il pose la question de la validité des réquisitions judiciaires ciblant Gmail en tant qu’opérateur de communications électroniques, des sondes de l’ANSSI (visées à l’article) L.33-13 CPCE et autres boîtes noires »

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