Apple trouve sa place dans l’entreprise

Un nouveau hardware puissant, un nombre croissant de déploiements à grande échelle, la capacité à gérer et à prendre en charge facilement ces déploiements… La place d’Apple est bien aussi dans l’entreprise.

Le niveau d’intégration des terminaux Apple a été développé au point de concurrencer le monde du PC. (crédit : D.R.)

Pour Apple, on peut dire que le mois d’octobre a été marqué par des évènements très « pro ». En effet, après la conférence utilisateur JAMF Nation qui a eu lieu du 23 au 25 octobre à Minneapolis, très axée sur le déploiement, la gestion et le développement d’applications sur le lieu de travail, suivie par la présentation, le 29 octobre à Brooklyn, des nouveaux MacBook Air, Mac mini et iPad Pro avec une référence systématique aux environnements professionnels, il est clair que la présence d’Apple dans les entreprises et dans les environnements professionnels n’est plus une anomalie. À tous égards, ses outils ont autant leur place au bureau, à la maison qu’à l’école. Certes, voilà un certain temps qu’Apple crée des solutions avec des fonctionnalités d’entreprise. Et cela fait près d’une décennie que les salariés et les cadres apportent leurs iPhone et leurs iPad au bureau. Pourtant, il semble que quelque chose a changé dans le monde de l’IT d’entreprise qui fait qu’Apple est devenue un acteur majeur dans de multiples secteurs d’activité. Étonnamment, cela ne concerne pas l’architecture d’Apple ou celle de ses concurrents. Ce qui a changé, c’est l’ampleur de la présence d’Apple dans le monde professionnel.

Pendant des années, on évoquait le nombre d’entreprises optant pour les solutions d’Apple (et celles d’autres plates-formes non-PC comme ChromeOS et Android) et l’accent mis par la firme californienne sur des capacités clés de l’entreprise comme la sécurité, la facilité de déploiement, le support réseau, etc. Mais souvent, la taille de la plupart de ces déploiements était limitée, tout comme l’étendue de ces déploiements. En général, les outils de base comme Exchange, VPN, Office et d’autres outils de productivité étaient supportés, et il y avait peut-être une modeste boutique d’applications d’entreprise. À l’époque aussi, il était facile de penser qu’Apple était une entreprise ambitieuse, qui, entre autres choses, avait aussi la capacité d’intégrer ses systèmes à des processus métiers. Mais sa démarche allait bien au-delà.

Faire équipe avec IBM, SAP et d’autres

Les chiffres du programme Mac@IBM d’IBM, ceux de l’adoption de SAP pour mobiles et postes de travail et les chiffres de plusieurs autres déploiements massifs, dont certains sont bien connus et d’autres non, sont extrêmement significatifs. Le fait que des périphériques Apple sont déployés à plus grande échelle signifie que le constructeur californien se situe au même niveau que d’autres sur le marché de la technologie d’entreprise. Les intégrations faites par des entreprises comme Microsoft et d’autres leaders comme Cisco n’ont pas été décidées après coup, comme si les fournisseurs traditionnels avaient concédé quelques miettes ici et là à Apple. Non, le niveau d’intégration a été développé au point de concurrencer le monde du PC.

Pour donner une idée du seul marché de l’iPad, le CEO d’Apple, Tim Cook, a comparé la base installée de la tablette d’Apple aux ordinateurs portables Windows. Il faut insister sur ce point : la puissance du tout dernier iPad Pro rivalise facilement avec celle de nombreux ordinateurs de bureau et pourrait permettre à Apple d’étendre encore plus ses incursions dans l’entreprise. Certes, certains trouvent que la puissance de la nouvelle puce A12 Bionic de l’iPad Pro dépasse les besoins de nombreux utilisateurs d’iPad, y compris dans les environnements professionnels. Mais, au final, si l’iPad Pro offre toute la puissance brute dont il aura besoin dans un avenir prévisible, le modèle « non-Pro » de 9,7 pouces (qui succède à l’iPad Air et à l’iPad Air 2) est déjà suffisant pour accomplir des tâches professionnelles courantes comme exécuter Office, accéder aux dossiers patients informatisés à l’hôpital, ou gérer les services d’accueil dans la distribution, le transport aérien et les hôtels. La plupart des entreprises ne déploieront probablement pas des dizaines ou des centaines de milliers d’iPhone, d’iPad ou de Mac, mais leur nombre est en augmentation. En y regardant de plus près, il est probable qu’on décomptera beaucoup plus d’ordinateurs portables, de smartphones et de tablettes Apple dans l’entreprise qu’il y a quelques années. Et cette présence croît, Apple s’associant à des partenaires pour développer le support nécessaire à la gestion de ces déploiements, tout en maintenant l’expérience spécifique que peuvent offrir ses matériels.

Un iOS qui joue bien son rôle

Le concept selon lequel « il n’y aura pas de troisième étape », était l’un des grands thèmes de la conférence JAMF de cette année. Grâce au système de configuration d’entreprise développé par Apple à l’aide d’Apple Business Manager et du programme d’inscription de périphérique associé Device Enrollment Program (DEP) et du programme d’achat en volume Volume Purchase Program (VPP), les entreprises peuvent faire livrer un périphérique – toujours sous film plastique – à un travailleur distant et celui-ci sera automatiquement inscrit à leur suite de gestion, pourra télécharger les mises à jour et les certificats de sécurité, appliquer les profils de configuration et télécharger des applications prédéterminées (publiques et internes). L’utilisateur n’a rien à faire d’autre que d’allumer l’appareil, se connecter à Internet et se mettre au travail.

C’est puissant et presque magique pour l’utilisateur final, très facile à configurer et à gérer pour le département informatique de l’entreprise, et c’est incroyablement évolutif. Grâce à cela, les grandes entreprises arrivent à gérer leurs gros déploiements. L’autre élément important, c’est que pour atteindre un tel niveau d’évolutivité, Apple n’a pas essayé de tout faire lui-même. Le constructeur aurait pu choisir de créer ses propres solutions propriétaires de déploiement, de gestion et de support (et développer un tas d’applications professionnelles pour les seuls matériels Apple). Mais, dès les premiers jours d’iOS, l’entreprise a été assez intelligente pour ne pas en faire sa priorité.

La croissance d’Apple se poursuivra

Quand l’entreprise a lancé l’iPhone 3G en 2008 en même temps que l’App Store et la seconde version de son système iPhone OS (devenu ensuite iOS), elle n’a pas essayé de forcer les propriétaires d’iPhone à utiliser ses outils de messagerie et de collaboration. Au lieu de cela, elle a intégré un support natif pour Exchange. Deux ans plus tard, quand Apple a introduit des fonctionnalités de gestion d’entreprise et de déploiement dans iOS 4, lancé en même temps que le tout premier iPad, le constructeur a développé un framework qui permettait à des sociétés de tierce partie de fournir aux entreprises la plupart des outils de gestion IT. Cette méthode, Apple n’a pas cessé de l’appliquer au cours des années qui ont suivi. Le constructeur sait qu’il est doué pour fabriquer des matériels et des logiciels qui offrent aux utilisateurs une expérience très personnelle, et c’est exactement sur cela qu’il a concentré ses efforts. Cela permet aux partenaires et à d’autres fournisseurs d’assumer la responsabilité de faire fonctionner ses produits dans le monde professionnel. En 2008, personne n’aurait prédit à quel point iOS changerait la donne, que l’OS mobile d’Apple offrirait un tel niveau de support des fonctions métiers et des tâches d’entreprise, au même titre que l’industrie du smartphone n’a pas vu venir l’impact que provoquerait l’arrivée du premier iPhone. À certains moments, il semble qu’Apple a suivi une tendance dont il était lui-même le moteur.

En cette proche fin d’année 2018, Apple apparaît comme l’un des plus importants fournisseurs de technologie de l’entreprise. Après avoir vu la démonstration d’Adobe Photoshop pendant l’événement de Brooklyn et l’ampleur des déploiements de matériel Apple dans tous les secteurs d’activité, il est clair que les entreprises représentent un énorme marché potentiel pour la firme à la pomme et qu’elle ne va pas se reposer sur ses lauriers. Alors que le marché de l’informatique mobile grand public, en particulier le marché des smartphones, arrive à saturation, l’entreprise représente un espace de croissance idéal pour Apple. Et le constructeur se prépare clairement à en tirer parti. Pour en revenir au nouvel iPad Pro et au nouveau MacBook Air, plusieurs personnes se demandent si l’iPad Pro peut cannibaliser les ventes de Mac. Cette question n’est pas pertinente, pour deux raisons. D’abord, les ventes d’iPad et de Mac sont bonnes pour Apple. Plus important encore : si le nouvel iPad Pro gagne des parts dans l’entreprise, il le fera aux dépens du PC. C’est ce qui rend l’ampleur des déploiements Apple auxquels nous assistons – et la capacité de l’écosystème Apple à les prendre en charge – si importante.

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